Sinon, à part ça, je suis dans un de ces troquets d’antan. Ceux dans lesquels tu t’attends à boire un café dans une tasse ébréchée. La dame me salue, je lui annonce un café, s’il vous plait. J’ai envie de préciser « dans une tasse propre », mais je me tais. C’est une mauvaise blague que j’aime faire au restaurant.
Comme si le fait d’avoir moi-même tenu un établissement me donnait le droit de déconner là-dessus. La patronne (ça s’entend à sa voix rauque d’ex-fumeuse de gitane) me sert, je la paye et prends mon café. Je file en terrasse. Il est 15 :10. Le soleil me masse. Devant moi, un type s’assoit, casquette New York Yankees. Je me lève et simule un appel. En me levant, je shoote à la volée. Il est cadré. Le vieux n’a rien vu. Je l’ai sincèrement trouvé beau. Racé. (C’est celui en photo plus haut). J’aurais aimé lui dire, mais je n’ai pas osé. Derrière moi, la table fait du bruit. Un homme d’une cinquantaine d’années est au pastis (visiblement pas son premier). Il est assis avec deux plus jeunes, bières à la main. Le gars parle fort au téléphone et précise à son interlocuteur qu’il fait son maximum. Que la pluie a ralenti les chantiers. Qu’il bosse dur et qu’il espère que ce sera fini pour la fin de semaine. Je lis entre les lignes qu’il s’adresse au maitre d’ouvrage. Il a le teint de l’artisan. Bronzée, la peau craquelée. Je ne peux pas m’empêcher de rire intérieurement quand je vois les tournées de pastis qui s’enchainent et que j’imagine le chantier en attente. J’ai relevé mes e-mails, c’était le but à la base. Même si le Wi-Fi est gratuit, je culpabilise toujours de ne rien commander… J’ai fini mon café. Je suis presque triste. J’étais bien là…
Ou l’envoyer à quelqu’un de bien.